Le Grand Paris est-il incompatible avec les perspectives de décentralisation ? Bien que le ministre Cécile Duflot assure qu’elle maintient le projet (cf. la réponse à ma question au Premier ministre le 17 juillet), on peut se poser la question sur la nature des réticences qui motivent le Gouvernement. Car de sérieuses interrogations restent en suspens en ce qui concerne le financement (20 milliards d’EUR), surtout depuis que le ministre du budget renâcle à mobiliser les moyens nécessaires (1 milliard d’EUR initialement prévus dans la loi de programmation des finances publiques) (*). Dans le prochain débat sur la décentralisation qui démarrera dès octobre prochain nous ne devons pas céder à la tentation d’opposer le Grand Paris aux autres territoires. Au contraire. Notre avenir dépend de la bonne articulation entre les zones urbaines et les zones à faible densité. Les premières, par la nature des entreprises qu’elles abritent, sont à la fois des « fabriques » de compétitivité et des « zones de connexion » avec le monde. Les secondes sont des espaces à vocation productive, agricole, artisanale ou touristique essentiels pour notre équilibre économique et social; elles abritent une grande partie de nos atouts différenciateurs. Si, par exemple, une PME textile est à 2h00 d’une métropole, elle n’a pas d’avenir car elle ne pourra pas résister à la pression des prix, si elle est à 30′ d’un grand pôle urbain elle pourra y puiser la créativité et l’innovation qui lui permettront de rebondir … C’est la même chose pour tous les secteurs. Notre avenir dépend donc de notre capacité à combiner les deux pour construire cette compétitivité « hors prix » que chacun appelle de ses voeux. L’enjeu consiste donc à développer des métropoles fortes qui tirent tous les territoires. Le Grand Paris doit jouer ce rôle et d’autres métropoles doivent aussi aller dans ce sens comme Marseille, Nantes, Bordeaux ou Lille. Le débat sur la décentralisation ne devra pas être une série d’arbitrage entre « Paris et le reste de la France » mais la recherche d’un schéma moderne sur « Les métropoles françaises, vecteur de développement pour nos territoires ». Cette approche est stratégique si nous voulons faire de la mondialisation une perspective de croissance pour la France. L’a t-on compris ?
(*) Plusieurs tronçons sont menacés ou pourraient être différés comme la connexion du plateau de Saclay. Pourtant ce projet est nécessaire à plusieurs titres : il permet de désenclaver de nombreuses villes et quartiers et de donner un nouvel élan, social et économique, au territoire métropolitain; il constitue un vecteur de croissance et d’emploi sans précédents (près de 200.000 emplois possibles dans les années à venir); il participe directement de la compétitivité et de l’attractivité économique de la capitale. Mais surtout c’est une « locomotive » pour le reste de la France.